Ne croyez pas que le mot « cantina » ait le même sens que le mot “cantine” en français, d’ailleurs ce mot vient de l’italien qui signifie « cave”. Lorsqu’à Buenos Aires et en Argentine on vous parle de “cantina”, on fait allusion à un type de restaurant que l’on trouve partout, c’est ce que l’on pourrait appeler un “restaurant de quartier”. On y sert des plats copieux et simples.
Rentrons un peu dans les détails, tout d’abord la salle: toujours énorme, souvent dans un vieil immeuble, de préférence à l’angle d’une rue. La hauteur sous plafond permettrait de pouvoir y jouer au basket sans aucun problème, mais on s’en sert plutôt pour y accrocher de vieux jambons et étaler sur d’interminables étagères des kilomètres de bouteilles de vin qui ont sûrement dû déjà tourner au vinaigre.
Le personnel : ça grouille de serveurs, d’ailleurs ça bouscule, ça crie, ça interpelle. J’ai remarqué que les meilleures cantinas étaient toujours garnies de “vieux serveurs”, ils font partie du lieu, certains sont même septuagénaires, connaissent tout le monde et surtout connaissent les goûts de chacun. Ce sont de véritables acteurs, ils jouent leur rôle à la perfection, même leur habillement a de quoi surprendre, puisque dans la même cantina, un sera en jean et t-shirt alors qu’un autre sera en pantalon, chemise blanche et nœud papillon. Comme dans la Commedia dell’arte où chacun en fonction de son habit de scène aura son propre rôle à interpréter.
Le patron : souvent avec la patronne, la cantina est toujours une affaire de famille. À la mort du père, c’est le fils qui va reprendre l’affaire et ainsi de suite. Il décide, et quand je dis qu’il décide, il décide de tout. On pourrait même dire qu’après Dieu c’est lui. Il fait respecter l’ordre dans le service, dans la cuisine, et en salle, y compris chez les “invites”. Vous n’y allez pas comme clients, vous y allez manger parce que le patron l’accepte. J’ai déjà vu plusieurs fois des “invites” se faire sortir d’une cantina pour un propos déplacé, ou certains se faire refuser l’entrée pour une vieille histoire mal digérée. Le patron, comme l’éléphant, a de la mémoire!
La cuisine : je parle du lieu, elle date en fait souvent de l’endroit, quelques fourneaux ont peut-être été changés au fil des décennies, mais souvent le centre des opérations est la parrilla centenaire graissée par des millions de saucisses et de bifes qui y sont passés. La cuisine, tout comme la salle, vaut souvent une photo!
L’assiette : n’y cherchez pas le raffinement ou des plats exotiques, cherchez-y l’abondance et la base de la cuisine portègne : viande, salades, pâtes, saucisse, parrilla, omelettes en tout genre. Côté boisson : El vino de la casa ou du petit vin pas trop cher, bien souvent impossible d’y trouver une demi-bouteille, d’ailleurs ça serait vraiment un manque d’élégance d’en commander une puisqu’on y va entre amis ou en famille pour “festoyer”, on y chercherait plus des bouteilles de 5 litres si ça pouvait exister !